INTERVIEW

RENCONTRE AVEC JEAN BRUCE

today03/03/2025 93 8

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Cette semaine, on est heureux de recevoir JEAN BRUCE. A la fois artiste, patron du label NOCTURBULOUS, compositeur, animateur radio, écrivain, ce Biterrois vient de publier un ouvrage aux éditions Signal Zéro intitulé « NEW BEAT » et consacré à… à la new beat !

L’occasion était donc belle pour lui poser quelques questions sur son parcours, ses différents projets et la genèse de son livre, dans lequel il revient à travers 60 morceaux sur l’histoire de ce courant de la musique électronique qui a explosé en Europe à la fin des années 80.

Et comme on est avant tout une radio, il nous proposera ce vendredi 07 mars dès 19h00 pendant 1 heure un DJ set 100% new beat.

Rencontre donc avec Jean Bruce.

 

 

E-KWALITY RADIO : Salut Jean ! Peux-tu te présenter en quelques mots ?

JEAN BRUCE : Salut les passionnés ! Je suis Jean Bruce, originaire d’Occitanie, né à la fin des années 70. J’ai plusieurs casquettes : DJ, Compositeur, remixeur, bidouilleur de son et d’image sur ma chaine YouTube, gérant du label Nocturbulous Records, cocréateur de Radio Punch, interviewer, Organisateur d’évènements, conférencier et nouvellement écrivain.

 

EKR : Quels sont tes premiers souvenirs musicaux (tous styles confondus) ?

JB : A part les musiques de dessins animés japonais de ma jeunesse, je dirais le grand Michael Jackson, puis l’electro boogie / electro funk (H.i.p / H.o.p), un peu d’italo disco et enfin la claque de ma vie, avec la house music en 1987 et tout de suite après l’acid house et la new beat.

 

EKR : Tes premiers pas derrière les platines et les machines, c’était quand et à quelles occasions ? 

JB : J’ai eu en cadeau d’anniversaire en 1990 deux platines à courroie BST pro 70 avec une table de mixage Power, un casque fermé et deux feutrines. Dans le package j’avais aussi des cours de DJ mais l’animation en mode DJ « piche » comme on dit chez moi, ça me mettait mal à l’aise. En revanche, le côté DMC et « turntablism » me fascinait, tout comme les mégamix espagnols. Je n’arrêtais pas de faire des cassettes où toutes les sources (vinyles, K7 et CD) se mélangeaient dans tous les sens. J’ai été initié cette même année à Cubase sur Atari dans l’atelier de musique atypique de ma professeure de musique, qui avait monté un studio d’enregistrement dans le collège. Tous les mercredis, j’allais composer une mixture de house/new Beat/techno sur du matos de fou pour l’époque (sampler Akai S1000, Yamaha DX7 et RX17, Roland SY22, table 24 pistes, magnéto a bande Revox etc…). A cette époque, sur 1000 élèves, on ne devait être que 4 ou 5 à écouter cette musique.

 

 

EKR : Tu viens de sortir un livre consacré à la new beat sous le nom « NEW BEAT » (tout simplement) aux éditions Signal Zéro. Comment est née l’idée de cet ouvrage et cette envie de relater l’histoire de ce style ?

JB : Clément Pérez aka 14Anger a créé cette maison d’édition alternative avec d’autres experts et artistes passionnés ayant déjà roulés leur bosse dans des magazines, fanzines et autres médias depuis plus de 20 ans. L’objectif avec la série « Sous le radar » est de créer des guides de musiques alternatives et Underground afin de mieux les connaitre. Klem m’a contacté car il souhaitait sortir un ouvrage sur la new beat et il savait que j’avais une bonne connaissance sur le sujet.

J’ai tout de suite accepté et écrire est devenu une nouvelle passion, ce n’est donc pas le dernier ouvrage sur lequel je vais travailler.

 

EKR : Ecrire un livre sur un courant musical relativement éphémère peut être sujet à pas mal de difficultés. Comment as-tu procédé pour te documenter et obtenir de la matière et des sources pour rédiger ton ouvrage ?

JB : J’ai constaté que la new beat était un style assez peu connu finalement. Je souhaitais donc sélectionner 60 titres qui, selon moi, sont parmi les meilleurs afin de susciter l’intérêt quelque soit le profil du lecteur.

Ma sélection comprend globalement 4 styles. D’abord l’« AB Sound» c’est à dire des titres électroniques des 80’s ralentis de 45T en 33T tout en pitchant la vitesse à +8%. Ensuite il y a eu les productions originales de New Beat dès la fin 1987. Puis l’Acid New Beat, une version teintée d’Acid House, et enfin le Hard Beat, version plus dure dont le tempo s’accélérait et qu’on pourrait qualifier de « Proto Techno Belge». Je n’ai cité aucun morceau de Nougat Beat, cette version ultra commerciale et dévoyée qui a fini par tuer le mouvement.

Les sources de mes recherches me viennent des informations amassées pendant toutes ces années notamment lors de mes interviews et collaborations, j’ai aussi contacté la quasi-totalité des artistes cités dans l’ouvrage. j’ai obtenu pas mal d’informations inédites. Le livre est enfin interactif car il contient un code QR qui envoie vers une playlist ou l’on peut écouter sur YouTube chaque titres dans sa meilleure version avec un remaster et un vidéo-clip faits par mes soins.

 

Crédit photo: Cyril Armada

 

EKR : tu es également à la tête avec ton acolyte Benjamin le Dauphin de Nocturbulous records, qui est à la fois un label de musique électronique et depuis quelques années une série d’interviews vidéos que vous accordez à pas mal de très beaux artistes, comme Laurent Garnier, Jack de Marseille, Electric Rescue, CJ Bolland, Madben… pour ne citer qu’eux. Peux-tu nous parler des différentes orientations de ce projet ?

JB : Avant le covid, je trouvais le format des interviews type Kombini, de 5 minutes à 10 minutes max, frustrant. J’ai toujours voulu entendre les artistes parler longuement de leurs influences musicales et apprendre à les connaître. Ce format existait pourtant dans le Rap, le Rock ou le Jazz. Dès les premiers jours du Covid, j’ai tout de suite eu l’envie de lancer le projet car c’était l’occasion avec Benjamin de sortir le projet Radio Punch de la confidentialité. « Grace » au confinement nous avons pu inviter des artistes d’habitude peu disponibles. Nous avons été « parrainés » par les tôliers, The Hacker, Jack de Marseille et Laurent Garnier entre autre.

Ca nous a aussi rapproché d’une communauté de vrais passionnés qui ont une soif d’Histoire de la Techno.

En ce qui concerne notre label Nocturbulous Records crée en 2005 , nous avons sorti pas mal de vinyles et collaborés avec des artistes de légende comme Woody McBride, D-Shake, Altern 8, Slipmatt, SA42, Orlando Voorn ou Olivier Abbeloos.

Nous avons aussi signés des licences de classiques des années 80/90 sur Nocturbulous Classics. Pour les sonorités moins typées « old school », nous avons créé Nocturbulous Techno City. Tout peut être découvert sur notre Bandcamp.

 

EKR : On te sent très attachée à l’Histoire de la musique et au processus d’évolution dans le temps d’un artiste ou de la musique. Ça te vient d’où ?

JB : Merci pour cette pertinente question. J’ai toujours été atypique et adoré passer des heures à étudier les parcours, influences, histoires et matériels de mes artistes préférés.Je peux même dire que je préfère ça plutôt que de sortir en soirée.

J’ai aussi envie de partager cette passion qui m’anime. Mon slogan pourrait être d’avoir à cœur de sortir la techno de son ghetto du plaisir immédiat et de lui conférer une approche plus culturelle et historique. C’est notamment en ce sens que j’ai lancé la conférence « Hip Hop / Electro, histoires croisées ».

 

Crédit photo: Nicolas Guerrier

 

EKR : La musique et la scène électroniques ont beaucoup changé ces dernières années. Quel regard portes-tu sur leur évolution ?

JB : Dans la scène techno, il y a une dérive « hollywoodienne », certains artistes deviennent des stars pour des raisons superficielles, c’est l’ère des managers rois, qui en coulisses pilotent leurs poulains afin de générer un maximum de revenus et d’exposition éphémère.

J’ai constaté en off beaucoup de souffrance et de névrose dans le milieu. Des artistes tirent quand même leur épingle du jeux en restant eux-mêmes et en refusant de pactiser avec le diable. La business-techno fait du mal à la techno mais elle s’en remettra.

En ce qui concerne l’évolution de la musique en elle-même, je constate dans les styles à la mode que les recettes 80’s 90’s tournent à plein régime, joyeusement et improbablement mélangés par les jeunes générations qui ne s’encombrent pas d’anachronisme. Et rebaptisent un mélange post gabber/makina/euro dance/trance commerciale 90’s en « uptempo », « bass music » « hard music » et autres adjectifs maladroits. Ca m’amuse et m’agace aussi je dois avouer. J’espère que nous arriverons à faire sortir notre musique de sa phase d’adolescence. Pour le reste, dans l’underground il y a une qualité de production incroyable et notamment en France.

D’un point de vue de la technologie, de sa démocratisation et de ses possibilités infinies, on assiste selon moi à une époque parmi les plus excitantes jamais vécues. Pour peu qu’on ait la force de sortir du carcan du top 100 Beatport.

 

EKR : Quel(le)s sont les artistes qui te chatouillent joliment les oreilles en ce moment ?

JB : Il y a de supers talent chez les jeunes notamment dans l’electro « la vraie » (ceux qui me connaissent savent que je ne parle pas du terme dévoyé). Je te citerais, Vondkreistan, Mascarpone, Back From The Wave, Arpatronic, des gens comme DVSNME, Noamm ou Belaria, Commuter, Endrick Shroeder et bien d’autres. il y a aussi les artistes de chez nous vers Béziers comme Loloman qui cartonne. J’écoute aussi des Britanniques qui font du Breakbeat Oldskool comme Obsidian Wave. De l’EBM avec Töt ou Kalt. Aussi des vieux sons New Beat qui continuent de m’inspirer. Et sinon en ce moment, j’écoute du rap de Memphis des années 90 bien crado, électronique et avant-gardiste. Et bien sûr les légendes souvent oubliées de Detroit comme James Pennington et Gerald Donald dont je ne me lasse pas.

 

EKR : Un dernier mot ?

JB : Merci pour ton média qui fait de la résistance, ton travail est précieux.

J’invite tous les vrais passionnés à prendre contact avec moi pour échanger sur notre passion commune.

 

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Écrit par: E-Kwality Radio

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